Au cours des dernières décennies, un large spectre de bactéries, de virus et de parasites ont développé une résistance aux antibiotiques et à d’autres médicaments antimicrobiens. Pour s’assurer que ces traitements essentiels restent efficaces, l’OMSA recueille des données sur les quantités et les motifs d’utilisation des antimicrobiens chez les animaux dans le monde entier. Ces informations sont précieuses pour réduire leur utilisation excessive et incorrecte et freiner la propagation de la RAM.
Depuis 2015, les services vétérinaires du monde entier communiquent à l’OMSA des informations sur l’utilisation d’antimicrobiens chez les animaux dans leur pays. Pour faciliter l’accès à ces informations essentielles et en constante augmentation, la base de données a récemment été entièrement numérisée. En 2022, la nouvelle plateforme en ligne sur les agents antimicrobiens destinés à être utilisés chez les animaux, ANIMUSE (pour ANImal antiMicrobial USE), a commencé à être testée par les pays avant son lancement public, prévu en 2023. Elle comprend des rapports simplifiés, des contrôles d’erreurs et des outils de visualisation des données qui facilitent l’analyse et la communication. À terme, elle vise à améliorer les pratiques des personnels vétérinaires en matière d’utilisation des antimicrobiens.
Proposer une analyse accessible de l’utilisation des antimicrobiens
La Dre Carolee Carlson, vétérinaire et épidémiologiste à l’Agence de santé publique du Canada, a participé au développement de la nouvelle plateforme. Elle a été parmi les premiers experts à la tester et à en mesurer les avantages. « ANIMUSE facilitera notre travail à bien des égards. Cette plateforme recueille suffisamment d’informations pour être utile, mais pas trop pour ne pas être surchargée. Je peux retrouver toutes les données que j’ai téléchargées au cours des dernières années, les comparer, voir le classement du Canada et ses tendances dans le temps. L’outil de détection des erreurs est très précieux, en particulier pour des données aussi complexes que celles-ci, qui proviennent de sources diverses. »
« La plateforme est très utile, car elle permet d’importer et d’utiliser les données beaucoup plus rapidement », explique quant à elle la Dre Slobodanka Božić, point focal de l’OMSA sur les produits vétérinaires pour la Bosnie-Herzégovine. Ancienne vétérinaire de terrain, elle est aujourd’hui chargée de recueillir des données sur l’utilisation des antimicrobiens pour le compte de l’office vétérinaire national de son pays. La Dre Božić a commencé à télécharger des données sur ANIMUSE en 2022. « La plateforme est pratique pour créer des présentations facilement utilisables pour les ministères et autres interlocuteurs clés. Notre pays ne dispose pas encore d’un plan d’action national sur la résistance aux antimicrobiens, c’est pourquoi une meilleure communication des données est un outil essentiel pour sensibiliser à cette question. »
Des solutions évolutives pour encourager la participation
En février 2023, quatre-vingt-douze pays avaient déjà transmis des informations à la base de données mondiale de l’OMSA sur la résistance aux antimicrobiens. Tous les pays, qu’ils soient Membres ou non de l’OMSA, peuvent participer à ce processus de notification. Ils soumettent alors des informations générales et, si des données quantitatives sont disponibles, peuvent choisir l’une des trois options proposées, en fonction du degré de détail de leurs données. « L’un des principaux atouts d’ANIMUSE est sa flexibilité, explique la Dre Carlson : les pays, quel que soit le niveau de leur programme de surveillance, peuvent déposer des rapports sur la plateforme. Même si un pays n’a qu’une connaissance limitée des quantités d’antimicrobiens utilisées chez les animaux, le fait de pouvoir accéder à la plateforme encourage les échanges et permet d’améliorer les choses au fil du temps. »
La Dre Božić a commencé à communiquer pour la Bosnie-Herzégovine en 2018, en utilisant l’option 1 : « À l’époque, je ne pouvais communiquer que sur le volume général d’antimicrobiens utilisés. Nous avons commencé par nos données sur les importations, puisque tous les antimicrobiens sont importés dans notre pays. En 2022, j’ai pu demander des informations aux grossistes et passer à l’option 3, avec beaucoup plus de détails sur les motifs d’utilisation, le type d’animaux et le mode d’administration des médicaments. Cela nous donne une image plus précise de l’utilisation des antimicrobiens dans notre pays. »
Une vision précise de l’utilisation des antimicrobiens pour améliorer les politiques publiques
Des données au niveau des exploitations sont également disponibles au Canada, y compris des informations sur les doses de médicaments, la durée et les motifs d’utilisation. « Du point de vue de l’intendance, ces données offrent de nombreuses possibilités. Par exemple, si vous savez qu’un produit est utilisé pour combattre une maladie spécifique, les décideurs politiques peuvent s’appuyer sur ces informations pour envisager le développement d’un vaccin comme alternative à l’utilisation d’antimicrobiens. Des informations détaillées sont notre meilleur atout dans la lutte. »
La plateforme ANIMUSE sera ouverte à la navigation publique en 2023.
Unir nos forces pour lutter contre la RAM
En novembre 2022, les ministres de la Santé, de l’Agriculture et les décideurs politiques du monde entier se sont réunis à Mascate (Oman) pour la troisième Conférence ministérielle mondiale de haut niveau sur la résistance aux antimicrobiens. Deux des objectifs clés convenus concernent exclusivement le secteur agroalimentaire :
- Réduire les quantités totales d’antimicrobiens utilisés chez les animaux et dans l’agriculture d’au moins 30 à 50 % d’ici 2030, en encourageant les efforts nationaux et mondiaux.
- Préserver les antimicrobiens d’importance critique pour la médecine humaine, en mettant fin à l’utilisation d’antimicrobiens médicalement importants à des fins non médicales chez les animaux, notamment comme promoteurs de croissance.
ANIMUSE joue un rôle clé dans le soutien que nous apportons à nos Membres pour atteindre ces objectifs : elle aide le personnel vétérinaire à comprendre et à surveiller l’utilisation des antimicrobiens de façon harmonisée et comparable sur la durée. À terme, elle permettra également l’analyse et la comparaison entre secteurs.