Code sanitaire pour les animaux terrestres

Sommaire | Index Chapitre 4.3. Titre 4. Chapitre 4.5.

Chapitre 4.4.


Application de la compartimentation



Article 4.4.1.


Introduction et objectifs

Les recommandations du présent chapitre fournissent un cadre structuré pour l’application et la reconnaissance des compartiments au sein de pays ou de zones, en vertu des dispositions du chapitre 4.3., en vue de faciliter le commerce d’animaux et de produits d’origine animale et de disposer d’un outil pour la gestion des maladies.

L’établissement et le maintien d’un statut indemne sur l’ensemble du territoire national doivent constituer l’objectif final des Membres de l’OIE. Toutefois, le franchissement de ces étapes peut s’avérer difficile à l’échelle d’un pays entier, en particulier pour les maladies qui peuvent facilement franchir les frontières internationales. Pour de nombreuses maladies, les Membres de l’OIE appliquent traditionnellement le concept de zonage pour établir et maintenir, à l’intérieur des frontières nationales, une sous-population animale caractérisée par un statut sanitaire différent.

La différence essentielle entre le zonage et la compartimentation tient au fait que la reconnaissance des zones repose sur des limites géographiques, alors que celle des compartiments se fonde sur les pratiques de gestion et la sécurité biologique. Les considérations spatiales, tout comme les bonnes pratiques de gestion, jouent cependant un rôle dans l’application des deux concepts.

La compartimentation n’est pas un concept nouveau pour les Services vétérinaires, car elle est appliquée depuis longtemps dans de nombreux programmes de contrôle des maladies qui reposent sur la notion de troupeau indemne.

La condition élémentaire de la compartimentation est l’application de mesures de gestion et de sécurité biologique permettant de créer une séparation fonctionnelle des sous-populations ainsi que leur documentation.

Ainsi, une opération de production animale réalisée dans un pays infecté ou une zone infectée peut être associée à des mesures de sécurité biologique et à des pratiques de gestion permettant d’assurer un risque négligeable par rapport aux maladies ou aux agents pathogènes. Le concept de compartiment repousse la « frontière du risque » au-delà de l’interface géographique et prend en compte tous les facteurs épidémiologiques qui peuvent contribuer à séparer efficacement différentes sous-populations selon des critères propres à une maladie spécifique.

Dans les pays ou les zones indemnes, il est préférable de définir les compartiments avant qu’un foyer de maladie n’apparaisse. En cas de survenue d’un foyer ou dans les pays ou zones endémiques infectés, la compartimentation peut être utilisée pour faciliter les échanges commerciaux.

Dans le cadre du commerce international, les compartiments doivent être placés sous la responsabilité directe de l’Autorité vétérinaire du pays. Aux fins du présent chapitre, le respect par les Membres des dispositions des chapitres 1.1. et 3.1. représente une condition préalable essentielle.


Article 4.4.2.


Principes appliqués pour la définition d’un compartiment

Un compartiment peut être créé pour une ou plusieurs maladies spécifiques. Le compartiment doit être clairement défini, en indiquant la localisation de l’ensemble de ses éléments constitutifs, y compris les exploitations, de même que les unités fonctionnelles associées (unités de production fabriquant des aliments pour animaux, abattoirs, usines d’équarrissage, etc.), leurs liens réciproques et leur contribution à une séparation épidémiologique entre les animaux présents dans un compartiment et les sous-populations caractérisées par un statut sanitaire différent. La définition du compartiment peut être axée sur les facteurs épidémiologiques propres à la maladie considérée, sur les systèmes de production animale, les pratiques de sécurité biologique, la nature des infrastructures et de la surveillance.


Article 4.4.3.


Séparation du compartiment par rapport aux sources potentielles d’infection

Le gestionnaire d’un compartiment doit fournir à l’Autorité vétérinaire des éléments de preuve relatifs aux aspects suivants :

  1. Paramètres physiques ou spatiaux ayant une incidence sur le statut du compartiment en matière de sécurité biologique

    Bien que le compartiment repose principalement sur des mesures de gestion et de sécurité biologique, l’examen des facteurs géographiques est nécessaire pour assurer une délimitation fonctionnelle correcte du compartiment par rapport aux populations animales adjacentes caractérisées par un statut sanitaire différent. Les facteurs énoncés ci-après sont à prendre en compte parallèlement aux mesures de sécurité biologique. Dans certains cas, ils peuvent influer sur le degré de confiance inhérent aux mesures de sécurité biologique et aux méthodes de surveillance générales :

    1. statut zoosanitaire des zones adjacentes et des secteurs présentant des liens épidémiologiques avec le compartiment ;

    2. Localisation, statut zoosanitaire et sécurité biologique des plus proches unités épidémiologiques et autres installations ayant une importance épidémiologique. Il convient de prendre en compte l’éloignement et la séparation physique par rapport :

      1. aux troupeaux ou cheptels de statut sanitaire différent se trouvant à proximité immédiate du compartiment, y compris à la faune sauvage et aux couloirs de migration ;

      2. aux abattoirs, usines d’équarrissage ou unités de production fabriquant des aliments pour animaux ;

      3. aux marchés, salons, foires agricoles, événements sportifs, parcs zoologiques, cirques et autres points de concentration animale.

  2. Facteurs liés aux infrastructures

    Les facteurs liés aux infrastructures des exploitations au sein d’un compartiment contribuent à l’efficacité de leur sécurité biologique. Il convient de prendre en compte les éléments suivants :

    1. clôtures ou autres moyens efficaces de séparer physiquement les animaux ;

    2. dispositifs prévu pour l’accès des personnes (contrôles des entrées, vestiaires et douches notamment) ;

    3. accès des véhicules, y compris opérations de nettoyage et de désinfection ;

    4. installations dévolues aux opérations de déchargement et de chargement ;

    5. installations d’isolement pour les animaux introduits ;

    6. procédures d’introduction du matériel et de l’équipement ;

    7. infrastructures réservées à l’entreposage des aliments et des produits vétérinaires ;

    8. élimination des carcasses, du fumier et des déchets ;

    9. approvisionnement en eau ;

    10. mesures destinées à prévenir l’exposition à des vecteurs mécaniques ou biologiques vivants tels qu’insectes, rongeurs et oiseaux sauvages ;

    11. ventilation ;

    12. approvisionnement en aliments pour animaux et source d’approvisionnement.

    Les titres  et du Code terrestre énoncent des recommandations plus détaillées concernant certaines exploitations.

  3. Plan de sécurité biologique

    L’intégrité du compartiment repose sur l’efficacité des mesures de sécurité biologique appliquées. Le gestionnaire du compartiment doit élaborer, appliquer et suivre un plan de sécurité biologique exhaustif.

    Le plan de sécurité biologique doit contenir une description détaillée des éléments suivants :

    1. modes potentiels d’introduction et de propagation dans le compartiment des agents pathogènes pour lesquels le compartiment a été défini, notamment les déplacements d’animaux, les rongeurs, la faune, les aérosols, les arthropodes, les véhicules, les personnes, les produits biologiques, les équipements, les objets contaminants, les aliments pour animaux, les cours d’eau, le système d’évacuation ou autres moyens. Il convient de tenir compte de la capacité de survie de l’agent dans l’environnement ;

    2. points critiques à maîtriser pour chaque mode d’introduction et de propagation ;

    3. mesures destinées à réduire l’exposition à chaque point critique ;

    4. procédures opératoires standard, notamment :

      1. application, maintien, suivi des mesures,

      2. application des mesures de correction,

      3. vérification du processus,

      4. tenue de registres ;

    5. plan d’intervention en cas de changement du niveau d’exposition ;

    6. procédures de déclaration à l’Autorité vétérinaire ;

    7. programme de formation du personnel visant à ce que toutes les personnes impliquées soient suffisamment informées des principes et des pratiques de sécurité biologique ;

    8. mise en place d’un programme de surveillance.

    Quoi qu’il en soit, des informations suffisantes doivent être fournies pour que l’efficacité du plan de sécurité biologique puisse être évaluée en fonction du niveau de risque correspondant à chaque mode de transmission identifié. Ces informations doivent être structurées conformément aux principes de l’analyse des risques et des points critiques à maîtriser (HACCP). Les risques de sécurité biologique liés à toutes les opérations du compartiment doivent être réévalués périodiquement et documentés au moins une fois par an. Des mesures concrètes et documentées d’atténuation des risques doivent être prises en fonction des résultats de la réévaluation obtenus afin de réduire la probabilité d’introduction de l’agent pathogène dans le compartiment.

  4. Système de traçabilité

    Une condition préalable de l’évaluation de l’intégrité d’un compartiment est l’existence d’un système de traçabilité valable. Tous les animaux se trouvant dans un compartiment doivent être identifiés et enregistrés individuellement de manière à ce que leur parcours et leurs déplacements puissent être documentés et contrôlés. Lorsque l’identification individuelle n’est pas possible, comme c’est le cas pour les poulets de chair et les poussins d’un jour, l’Autorité vétérinaire doit fournir des garanties suffisantes en termes de traçabilité.

    Tous les mouvements d’animaux en direction ou en provenance du compartiment doivent être consignés au niveau du compartiment et, si nécessaire, certifiés par l’Autorité vétérinaire en se fondant sur une appréciation des risques encourus. Les déplacements ayant lieu à l’intérieur du compartiment ne doivent pas être certifiés, mais devront être enregistrés au niveau du compartiment.


Article 4.4.4.


Documentation

La documentation doit prouver clairement que les pratiques de sécurité biologique, de surveillance, de traçabilité et de gestion définies pour un compartiment sont appliquées de manière effective et régulière. En dehors des informations sur les déplacements des animaux, les documents nécessaires doivent inclure les registres de production des troupeaux, l’origine des aliments distribués, les tests de laboratoire, les registres des naissances et des morts, le registre des visiteurs, l’historique des maladies, les relevés des traitements médicamenteux et des vaccinations, les plans de sécurité biologique, les documents de formation et tout autre critère nécessaire pour évaluer le dispositif d’exclusion des maladies considérées.

L’historique du statut zoosanitaire du compartiment au regard de la maladie ou des maladies pour laquelle ou pour lesquelles il a été défini, doit être documenté et doit démontrer le respect des conditions précisées au chapitre correspondant du Code terrestre pour l’obtention du statut indemne.

En outre, un compartiment souhaitant obtenir la reconnaissance de son statut doit présenter à l’Autorité vétérinaire un rapport zoosanitaire initial faisant état de la présence ou de l’absence de maladies de la Liste de l’OIE. Ce rapport doit être mis à jour périodiquement pour refléter la situation zoosanitaire actuelle du compartiment.

Les registres de vaccination consignant le type de vaccin utilisé et la fréquence d’administration doivent être disponibles pour permettre l’interprétation des données relatives à la surveillance.

Tous les registres doivent être conservés pendant une durée qui peut varier en fonction de l’espèce animale et de la maladie ou des maladies pour laquelle ou lesquelles le compartiment a été défini.

Toutes les informations pertinentes doivent être enregistrées d’une manière transparente et doivent être facilement accessibles afin de pouvoir être contrôlées par l’Autorité vétérinaire.


Article 4.4.5.


Surveillance de l’agent pathogène ou de la maladie

Le système de surveillance doit être conforme aux dispositions prévues par le chapitre 1.4. et aux recommandations qui se rapportent à la surveillance de la ou des maladie(s) pour laquelle ou lesquelles le compartiment a été défini si elles existent.

Face à un risque accru d’exposition à l’agent pour lequel le compartiment a été défini, la sensibilité du système de surveillance interne et externe doit être réévaluée et accrue. Parallèlement, les mesures de sécurité biologique en place devront être réexaminées et accrues si nécessaire.

  1. Surveillance interne

    La surveillance doit inclure le recueil et l’analyse des données sur la maladie ou l’infection de manière à ce que l’Autorité vétérinaire puisse certifier que les sous-populations animales détenues dans toutes les exploitations répondent au statut défini pour ce compartiment. Il est essentiel de mettre en place un système de surveillance capable d’assurer une détection précoce de tout agent pathogène qui contaminerait une sous-population. Selon la maladie ou les maladies pour laquelle ou lesquelles le compartiment a été défini, différentes stratégies de surveillance peuvent être appliquées pour assurer la crédibilité voulue dans le statut indemne.

  2. Surveillance externe

    Les mesures de sécurité biologique appliquées dans un compartiment doivent être adaptées au niveau d’exposition du compartiment. Une surveillance externe permet de détecter tout changement important du niveau d’exposition correspondant aux modes d’introduction des maladies identifiés dans le compartiment.

    Une combinaison adaptée de surveillance active et de surveillance passive est nécessaire pour atteindre les objectifs décrits ci-dessus. D’après les recommandations du chapitre 1.4., une surveillance ciblée fondée sur l’évaluation des facteurs de risque pourrait constituer la méthode la plus efficace. La surveillance ciblée doit en particulier concerner les unités épidémiologiques situées à proximité immédiate du compartiment ou les unités ayant un lien épidémiologique potentiel avec celui-ci.


Article 4.4.6.


Capacités et techniques de diagnostic

Des laboratoires officiellement agréés répondant aux normes d’assurance qualité de l’OIE définies dans le chapitre 1.1.3. du Manuel terrestre doivent être disponibles pour l’analyse des prélèvements. Toutes les épreuves et techniques de laboratoire doivent être conformes aux recommandations du Manuel terrestre pour la maladie concernée. Tous les laboratoires qui effectuent des analyses doivent mettre en place des procédures systématiques pour déclarer rapidement les résultats sanitaires à l’Autorité vétérinaire. Au besoin, les résultats doivent être confirmés par un Laboratoire de référence de l’OIE.


Article 4.4.7.


Notification et intervention d’urgence

La précocité de la détection, du diagnostic et de la notification des maladies est essentielle pour limiter les conséquences des foyers.

En cas de suspicion ou de présence de la maladie pour laquelle le compartiment a été défini, le statut de compartiment indemne doit être immédiatement suspendu. En cas de confirmation, le statut du compartiment doit être suspendu et les pays importateurs doivent en être avisés conformément aux dispositions prévues à l’article 5.3.7.

En cas d’apparition d’une maladie infectieuse antérieurement absente d’après le rapport zoosanitaire initial visé à l’article 4.4.4., le gestionnaire du compartiment doit en avertir l’Autorité vétérinaire et déclencher une enquête pour rechercher une faille éventuelle dans les mesures de sécurité biologique. Si une lacune significative est détectée dans ce dispositif, les certificats d’exportation émis au titre du compartiment indemne doivent être suspendus, même en l’absence de foyer. Le statut indemne de maladie ne peut être recouvré qu’après l’adoption, par le compartiment, des mesures nécessaires au rétablissement du niveau initial de sécurité biologique et après la reconnaissance du statut du compartiment par l’Autorité vétérinaire.

Si un compartiment est exposé à un risque de changement de la situation sanitaire pour laquelle il a été défini (risque émanant du secteur environnant), l’Autorité vétérinaire doit réévaluer sans délai le statut de ce compartiment et envisager les mesures de sécurité biologique complémentaires qu’elle juge nécessaires pour garantir le maintien de l’intégrité du compartiment.


Article 4.4.8.


Supervision et contrôle d’un compartiment

L’autorité, l’organisation et l’infrastructure des Services vétérinaires et des laboratoires doivent être clairement documentés conformément aux dispositions du chapitre du Code terrestre relatif à l’évaluation des Services vétérinaires afin d’assurer la crédibilité de l’intégrité du compartiment.

L’Autorité vétérinaire a l’autorité, en dernier ressort, d’accorder, de suspendre et de révoquer le statut d’un compartiment. L’Autorité vétérinaire doit superviser en permanence le respect de toutes les conditions essentielles au maintien du statut du compartiment décrit dans le présent chapitre et veiller à ce que toutes les informations soient facilement accessibles aux pays importateurs. Tout changement significatif doit être notifié au pays importateur.

2011 ©OIE - Code sanitaire pour les animaux terrestres

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