Code sanitaire pour les animaux terrestres

Sommaire | Index Chapitre 5.12. Titre 6. Chapitre 6.2.

Chapitre 6.1.


Le rôle des Services vétérinaires
dans la sécurité sanitaire
des denrées alimentaires



Article 6.1.1.


Objectif

Le présent chapitre vise à fournir une orientation aux Membres de l’OIE sur le rôle et les compétences des Services vétérinaires en matière de sécurité sanitaire des denrées alimentaires, afin de les aider à réaliser les objectifs fixés par les législations nationales en la matière et à satisfaire aux exigences des pays importateurs.


Article 6.1.2.


Contexte

À l’origine, les Services vétérinaires ont été institués pour lutter contre les maladies des animaux de rente dans les exploitations. L’accent était alors mis sur la prévention et le contrôle des principales maladies épizootiques des animaux de rente ainsi que des maladies transmissibles de l’animal à l’homme (zoonoses). À mesure que les pays parvenaient à maîtriser les épizooties les plus graves, les compétences des Services de santé animale ont été naturellement étendues aux maladies affectant la production animale, afin d’accroître la productivité des exploitations et d’améliorer la qualité des produits d’origine animale.

Le domaine d’intervention des Services vétérinaires a été élargi de la ferme à l’abattoir, où les vétérinaires exercent désormais une double fonction : assurer la surveillance épidémiologique des maladies animales et garantir la sécurité sanitaire et les critères de qualité des viandes destinées à la consommation. Ayant reçu une formation axée sur les maladies animales (zoonoses comprises) mais aussi sur l’hygiène alimentaire, les vétérinaires sont particulièrement compétents pour jouer un rôle déterminant dans le domaine de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires, notamment celle des denrées alimentaires d’origine animale. Comme cela sera précisé plus bas, outre les vétérinaires, d’autres professionnels interviennent pour assurer une approche intégrée de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires tout au long de la chaîne alimentaire. Dans plusieurs pays, les compétences des Services vétérinaires ont été élargies afin de couvrir les étapes postérieures de la chaîne alimentaire dans le continuum « de l’étable à la table ».


Article 6.1.3.


Les différentes approches de la sécurité sanitaire des denrées alimentaires

  1. Le concept de chaîne continue en production alimentaire

    La meilleure méthode pour garantir la sécurité sanitaire et la qualité des denrées alimentaires est l’approche intégrée et pluridisciplinaire couvrant la totalité de la chaîne de production de denrées alimentaires. L’élimination ou la maîtrise des risques alimentaires à la source, autrement dit l’approche préventive, s’avère plus efficace pour réduire ou éliminer les risques sanitaires indésirables qu’une approche fondée uniquement sur la vérification finale des produits. Les manières d’aborder la sécurité sanitaire des denrées alimentaires ont considérablement évolué ces dernières décennies, depuis les méthodes traditionnelles de contrôle fondées sur les bonnes pratiques (bonnes pratiques agricoles, bonnes pratiques d’hygiène, etc.), en passant par les systèmes de sécurité sanitaire des denrées alimentaires axés sur l’analyse des dangers et les points de contrôle critiques pour leur maîtrise (HACCP), jusqu’aux approches basées sur le risque et appliquant la méthode d’analyse des risques pour la sécurité sanitaire des denrées alimentaires.

  2. Systèmes de gestion basés sur le risque

    L’essor des systèmes basés sur le risque a été fortement encouragé par l’Accord de l’Organisation mondiale du commerce sur l’Application des mesures sanitaires et phytosanitaires (Accord SPS). Cet Accord stipule que les pays signataires doivent fonder leurs mesures sanitaires et phytosanitaires sur une évaluation des risques pour la vie et la santé humaines ou animales ou pour celles des végétaux, en utilisant les techniques d’évaluation du risque recommandées par les organisations internationales compétentes dans chaque domaine. L’évaluation du risque, qui est le volet scientifique de l’analyse du risque, doit être distinguée, sur le plan opérationnel, de la gestion des risques, afin d’éviter toute interférence d’intérêts économiques, politiques ou autres. L’Accord SPS reconnaît spécifiquement aux normes mises au point par l’OIE la fonction de références internationales dans le domaine de la santé animale et des zoonoses ; les normes élaborées par la Commission du Codex Alimentarius s’appliquent, quant à elles, à la sécurité sanitaire des denrées alimentaires. Depuis quelques décennies, on assiste également à une redéfinition progressive des compétences. L’approche traditionnelle selon laquelle les opérateurs de l’industrie alimentaire doivent garantir la qualité de leurs produits tandis que la sécurité sanitaire des aliments relève des compétences des agences normatives a été remplacée par des systèmes plus sophistiqués, en vertu desquels la responsabilité première de la qualité et de la sécurité sanitaire des produits mis sur le marché incombe aux opérateurs de l’industrie alimentaire. Dans ce contexte, le rôle des agences de contrôle consiste à analyser l’information scientifique justifiant les normes de sécurité sanitaire des denrées alimentaires (applicables lors de la phase de transformation mais aussi pour le produit final) et à procéder à des inspections pour vérifier que les systèmes de contrôle appliqués par les opérateurs de l’industrie sont appropriés et validés et qu’ils respectent effectivement les dispositions normatives. En cas de non-conformité constatée, les agences de contrôle s’assureront que des mesures de correction appropriées sont prises et que des sanctions appropriées sont appliquées.

    Les Services vétérinaires jouent un rôle central pour faire appliquer le processus d’analyse du risque et pour mettre en œuvre les recommandations fondées sur le risque au niveau des dispositifs réglementaires, y compris en ce qui concerne l’importance et la nature de la participation des vétérinaires en matière de sécurité sanitaire des denrées alimentaires tout au long de la chaîne de production, comme cela a été indiqué ci-dessus. Chaque pays doit fixer ses propres objectifs de protection de la santé animale et de la santé publique, en consultation avec les parties prenantes (notamment les éleveurs, les industriels et les consommateurs) et en fonction du contexte social, économique, culturel, religieux et politique du pays. La mise en application de ces objectifs doit se faire au moyen d’une réglementation et de politiques nationales appropriées et s’accompagner de mesures visant à sensibiliser les intervenants nationaux ainsi que les partenaires commerciaux.

  3. Les fonctions des Services vétérinaires

    Les Services vétérinaires contribuent à atteindre ces objectifs en procédant directement à certaines activités de médecine vétérinaire, mais aussi en assurant l’audit des activités de santé animale et de santé publique confiées à d’autres services officiels, aux vétérinaires du secteur privé ou à d’autres intervenants. Outre les vétérinaires, d’autres spécialistes sont amenés à intervenir à un point ou un autre de la chaîne alimentaire, à savoir, des analystes, des épidémiologistes, des techniciens en agroalimentaire, des experts de la santé humaine et environnementale, des microbiologistes et des toxicologues. Quelle que soit la répartition des rôles que le système administratif de chaque pays aura mise en place entre ces spécialistes et d’autres parties prenantes, il convient de veiller à établir une étroite collaboration et une communication efficace entre tous ces intervenants, afin d’obtenir les meilleurs résultats possibles. Lorsque des interventions vétérinaires ou d’autres tâches sont déléguées à des professionnels ou à des entreprises extérieurs à l’Autorité vétérinaire, il conviendra d’établir un cahier des charges précis détaillant les exigences réglementaires ainsi qu’un système de vérification des performances afin d’assurer le suivi et le contrôle des activités réalisées par ces intervenants extérieurs. En dernière instance, l’Autorité vétérinaire est seule responsable de la bonne exécution des interventions confiées aux intervenants extérieurs.

  4. Rôle des Services vétérinaires au niveau des exploitations

    Par leur présence dans les exploitations et le soutien qu’ils apportent aux éleveurs, les Services vétérinaires accomplissent une fonction déterminante : vérifier que les animaux évoluent dans des conditions d’hygiène satisfaisantes et assurer la surveillance, la détection précoce et le traitement des maladies animales, y compris des maladies ayant un impact sur la santé publique. Les Services vétérinaires fournissent également aux éleveurs des services d’information, de conseil et de formation destinés à éviter, à éliminer et à maîtriser les dangers menaçant la sécurité sanitaire des denrées alimentaires (y compris les aliments destinés aux animaux) pendant la phase de production, par exemple, les résidus de médicaments ou de pesticides, les mycotoxines ou les contaminants environnementaux. Les organisations d’éleveurs, surtout lorsqu’elles bénéficient des services de conseillers vétérinaires, sont bien placées pour fournir des prestations de sensibilisation et de formation, étant régulièrement en contact avec les éleveurs et connaissant bien leurs priorités. Le soutien technique fourni par les Services vétérinaires avec l’appui des vétérinaires privés et des personnels de l’Autorité vétérinaire est d’une importance capitale. Les Services vétérinaires jouent un rôle important pour favoriser l’utilisation responsable et prudente des produits biologiques et des médicaments vétérinaires dans les exploitations, y compris les agents antimicrobiens. Ils contribuent ainsi à réduire les risques de développement de l’antibiorésistance et à contenir les taux de résidus de médicaments vétérinaires présents dans les denrées alimentaires d’origine animale en-dessous des niveaux tolérés. Les chapitres 6.7. à 6.10. du Code terrestre contiennent les recommandations de l’OIE sur l’utilisation des agents antimicrobiens en médecine vétérinaire.

  5. Inspection des viandes

    L’inspection des animaux vivants (inspection ante mortem) et de leurs carcasses (inspection post mortem) à l’exploitation constitue une composante essentielle du réseau de surveillance des maladies animales et des zoonoses, visant à garantir la sécurité et la qualité des viandes et de leurs produits dérivés, compte tenu de leur destination finale. La maîtrise ou la réduction des dangers biologiques significatifs pour la santé animale et la santé publique grâce aux inspections ante mortem et post mortem constitue une des responsabilités centrales des Services vétérinaires, qui doivent veiller à ce que des programmes appropriés soient en place.

    Dans la mesure du possible, les procédures d’inspection devront être basées sur le risque. Les systèmes de gestion devront refléter les normes internationales et s’attaquer aux dangers les plus significatifs pour la santé animale et la santé humaine trouvant leur source dans les animaux de rente. Le Code d’usages en matière d’hygiène pour la viande du Codex Alimentarius constitue la principale norme internationale en la matière. Il intègre une approche fondée sur le risque pour appliquer des mesures sanitaires à chaque étape de la chaîne de production de la viande. Le chapitre 6.2. du Code terrestre contient des recommandations pour la maîtrise des dangers biologiques significatifs pour la santé animale et la santé publique par les inspections ante mortem et post mortem.

    Traditionnellement, la priorité du Code terrestre était de protéger la santé animale au niveau mondial et d’assurer la transparence en la matière. Conformément à son mandat actuel, l’OIE s’occupe aussi des risques liés à la sécurité sanitaire des denrées alimentaires d’origine animale pendant la phase de production. Le Code terrestre contient plusieurs normes et recommandations visant à protéger la santé publique (notamment le chapitre 6.2. intitulé « Maîtrise des dangers biologiques significatifs pour la santé animale et la santé publique par les inspections ante mortem et post mortem ») ; par ailleurs, de nouvelles normes sont en cours de préparation, visant à prévenir la contamination des produits d’origine animale par Salmonella spp. et Campylobacter spp. L’OIE et la Commission du Codex Alimentarius travaillent en étroite collaboration pour mettre au point des normes permettant de protéger les denrées alimentaires d’un bout à l’autre de la chaîne de production. Pour tout ce qui concerne la production et la sécurité sanitaire des produits d’origine animale, les recommandations de l’OIE doivent être lues parallèlement à celles de la Commission du Codex Alimentarius.

    L’Autorité vétérinaire doit autoriser une certaine marge de manœuvre dans les prestations visant l’inspection des viandes. Les pays ont le choix entre divers modèles de gestion, correspondant à divers degrés de délégation des compétences auprès de différents organismes officiels opérant sous la tutelle et la supervision de l’Autorité vétérinaire. Lorsque des intervenants du secteur privé sont amenés à réaliser des inspections ante mortem et post mortem sous la direction globale et la responsabilité de l’Autorité vétérinaire, celle-ci précisera les compétences exigées dans chaque cas et vérifiera la bonne exécution des tâches confiées à ces intervenants extérieurs. L’Autorité vétérinaire devra disposer de systèmes opérationnels permettant d’assurer le suivi des procédures d’inspection ante mortem et post mortem et l’échange des informations, afin de s’assurer que leur mise en œuvre est efficace. Il conviendra d’intégrer des systèmes d’identification et de traçabilité animale des animaux, afin de pouvoir remonter jusqu’à l’exploitation d’origine des animaux abattus et jusqu’à l’unité de transformation de leurs produits dérivés, tout au long de la chaîne de production des viandes.

  6. La certification des produits d’origine animale aux fins du commerce international

    Les Services vétérinaires ont également pour fonction de garantir que les certificats sanitaires régissant les échanges internationaux répondent aux normes de santé animale et de sécurité sanitaire des denrées alimentaires. La certification relative à l’absence de maladies animales, zoonoses incluses, ainsi qu’à l’hygiène des viandes relève des compétences de l’Autorité vétérinaire. Certains certificats (notamment sanitaires) peuvent être fournis par d’autres professions, en rapport avec les processus de transformation et de conditionnement (par exemple, la pasteurisation des produits laitiers), ou avec la conformité des produits aux normes de qualité.

  7. Autres fonctions des Services vétérinaires

    La plupart des foyers de toxi-infections alimentaires ont pour origine une contamination des denrées alimentaires par des agents de zoonoses pendant la production primaire. Les Services vétérinaires ont pour mission essentielle d’enquêter sur ces foyers en remontant jusqu’à l’exploitation d’origine et, une fois la source d’infection identifiée, de concevoir et de mettre en œuvre les mesures correctives appropriées. Cette tâche devrait être exécutée en étroite collaboration avec des professionnels de la santé humaine et environnementale, des analystes, des épidémiologistes, des producteurs et des industriels du secteur agroalimentaire, des négociants et d’autres intervenants.

    En plus des attributions décrites ci-dessus, les vétérinaires sont à même d’assurer d’autres fonctions liées à la sécurité sanitaire des denrées alimentaires à plusieurs endroits de la chaîne alimentaire et, notamment, d’effectuer des contrôles basés sur les principes HACCP ou sur d’autres systèmes d’assurance de la qualité lors de la transformation et de la distribution des denrées alimentaires. Les Services vétérinaires jouent également un rôle important dans la sensibilisation des producteurs, des industriels de l’agroalimentaire et d’autres parties prenantes à l’égard des mesures nécessaires pour garantir la sécurité sanitaire des denrées alimentaires.

  8. Maximaliser la contribution des Services vétérinaires en matière de sécurité sanitaire des denrées alimentaires

    Afin que la contribution des Services vétérinaires à la sécurité sanitaire des denrées alimentaires soit le plus efficace possible, il importe que les vétérinaires bénéficient d’une formation initiale, permanente et complète de haut niveau aux fonctions décrites dans le présent chapitre, et que des programmes nationaux accompagnent leur évolution professionnelle à ce sujet. Les Services vétérinaires observeront les principes fondamentaux de qualité décrits dans le chapitre 3.1. du Code terrestre. Le chapitre 3.2. du Code terrestre et l’Outil de l’OIE pour l’évaluation des performances des Services vétérinaires contiennent des recommandations sur l’évaluation des Services vétérinaires.

    La répartition des responsabilités et la chaîne de commandement au sein des Services vétérinaires devront être clairement consignées et solidement documentées. L’Autorité compétente nationale devra fournir aux Services vétérinaires un cadre institutionnel permettant d’élaborer et de mettre en œuvre les politiques et les normes requises, ainsi que les ressources suffisantes pour mener à bien leur mission de manière pérenne. Lors de l’élaboration et de la mise en œuvre des politiques et des programmes de sécurité sanitaire des denrées alimentaires, l’Autorité vétérinaire travaillera en étroite collaboration avec d’autres agences compétentes afin de s’assurer que les risques liés à la sécurité sanitaire des aliments sont abordés de manière concertée.

2011 ©OIE - Code sanitaire pour les animaux terrestres

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