Code sanitaire pour les animaux terrestres

Sommaire | Index Chapitre 6.6. Titre 6. Chapitre 6.8.

Chapitre 6.7.


Harmonisation
des programmes nationaux de suivi et
de surveillance de l’antibiorésistance



Article 6.7.1.


Objectif

Le présent chapitre fournit des critères pour :

  1. l’élaboration de programmes nationaux de suivi et de surveillance de l’antibiorésistance,

  2. l’harmonisation des programmes nationaux actuels de suivi et de surveillance de l’antibiorésistance,

applicables aux animaux et aux produits d’origine animale destinés à la consommation humaine.


Article 6.7.2.


Finalité du suivi et de la surveillance

  1. La surveillance et le suivi de l’antibiorésistance sont essentiels pour :

    1. suivre l’évolution de l’antibiorésistance chez les bactéries ;

    2. détecter de nouveaux mécanismes d’antibiorésistance ;

    3. fournir les données nécessaires à l’analyse des risques pour la santé publique et la santé animale ;

    4. étayer les recommandations politiques en matière de santé publique et de santé animale ;

    5. fournir des informations destinées à la prescription de pratiques et de recommandations en vue d’un usage prudent.

  2. Les programmes nationaux de suivi et de surveillance de l’antibiorésistance intégreront éventuellement les éléments suivants :

    1. des enquêtes scientifiquement conçues (y compris des programmes basés sur les statistiques) ;

    2. la collecte de prélèvements et la réalisation d’épreuves diagnostiques de routine sur les animaux à la ferme, sur les marchés ou à l’abattoir ;

    3. un programme basé sur des animaux utilisés comme sentinelles, prévoyant la collecte de prélèvements sur des individus, dans des troupeaux ou parmi des vecteurs ;

    4. l’analyse des pratiques vétérinaires et des résultats des diagnostics de laboratoire.

  3. Les pays devront réaliser une surveillance et un suivi actifs. Des informations supplémentaires seront éventuellement obtenues par surveillance et suivi passifs.

  4. La surveillance ciblée est assurée par un dispositif actif de prélèvements destinés à atteindre les objectifs du programme. La surveillance passive intervient lors de la remise d’échantillons étrangers au programme à un laboratoire d’analyse.


Article 6.7.3.


Mise en place de programmes de surveillance et de suivi de l’antibiorésistance

  1. Généralités

    La surveillance régulière de l’antibiorésistance ou le suivi permanent des changements intervenant dans la prévalence des bactéries résistantes d’origine animale, alimentaire, environnementale et humaine constituent une composante essentielle de toute stratégie visant à limiter la propagation de l’antibiorésistance et à optimaliser le choix des antimicrobiens à usage thérapeutique.

    Par ailleurs, il convient d’envisager le suivi des bactéries prélevées à différents stades de la chaîne alimentaire sur des aliments d’origine animale, par exemple à la transformation, au conditionnement et à la vente au détail.

  2. Stratégies d’échantillonnage

    1. Généralités

      1. L’échantillonnage sera effectué sur une base statistique. La stratégie d’échantillonnage devra garantir :

        • la représentativité de l’échantillon par rapport à la population concernée,

        • la robustesse de la méthode d’échantillonnage.

      2. Les critères suivants seront pris en considération :

    2. Taille de l’échantillon

      L’échantillon présentera les caractéristiques suivantes :

      1. une taille suffisante pour permettre la détection d’une résistance existante,

      2. une taille raisonnable pour éviter le gaspillage de ressources.

      Des informations détaillées sont fournies dans le tableau. L’échantillonnage sera réalisé selon les procédures opératoires normalisées.

  3. Origine de l’échantillon

    1. Animaux

      Chaque Membre de l’OIE devra examiner ses systèmes d’élevage et décider, à l’issue d’une analyse des risques, de l’importance relative de l’antibiorésistance et de son impact sur la santé publique et la santé animale.

      L’échantillonnage concernera entre autres les catégories suivantes d’animaux d’élevage : les vaches et les veaux, les porcs d’abattage, les poulets de chair, les poules pondeuses ou volailles diverses, ainsi que les poissons d’élevage.

    2. Denrées alimentaires et aliments pour animaux

      Les denrées alimentaires contaminées sont généralement considérées comme le vecteur principal de l’antibiorésistance des animaux aux humains. Les divers végétaux et produits maraîchers sont susceptibles d’avoir été en contact avec du fumier ou des déjections d’animaux d’élevage, et peuvent, par conséquent, avoir été contaminées par des bactéries résistantes d’origine animale. Par ailleurs, il conviendra d’envisager éventuellement des programmes de suivi et de surveillance des aliments pour animaux, y compris des produits importés.

Tableau 1. Estimation de la taille de l’échantillon
pour la détermination de la prévalence de l’antibiorésistance dans une grande population

Seuil de confiance
Prévalence
escomptée
90 % de précision recherchée95 % de précision recherchée
10 %5 %1 %10 %5 %1 %
10 %24972,429351383,445
20 %431734,310612466,109
30 %572275,650813238,003
40 %652606,451923699,135
50 %682706,718963849,512
60 %652606,451923699,135
70 %572275,650813238,003
80 %431734,310612466,109
90 %24972,429351383,445

Calculs effectués d’après « Epi Info v6.04b to c Upgrade » (octobre 1997), Centers for Disease Control
(logiciel du domaine public disponible sur le site http://www.cdc.gov/epo/epi/epiinfo.htm).

  1. Spécimens d’échantillon à prélever

    Dans le bétail, on prélèvera des échantillons de matières fécales ; chez la volaille, l’échantillonnage portera sur la totalité du cæcum. Un prélèvement d’au moins 5 g de matières fécales sera suffisant pour isoler les bactéries d’intérêt chez les bovins et porcins.

    L’échantillonnage des carcasses à l’abattoir fournit des informations sur la pratique d’abattage, l’hygiène à l’abattage et le degré de contamination de la viande par les matières fécales durant l’abattage. Le prélèvement d’autres échantillons dans la chaîne de vente au détail fournit des informations sur l’évolution de la prévalence en amont de la consommation.

    Les programmes actuels de suivi microbiologique de la transformation alimentaire et « d’analyse des risques et des points critiques pour leur maîtrise » (HACCP) sont susceptibles de constituer une source d’échantillons utiles pour le suivi et la surveillance de la résistance dans la chaîne alimentaire après abattage.

Tableau 2. Exemples d’origines et de types d’échantillon et résultats du suivi

OrigineNature du prélèvementRésultatBesoin d’informations supplémentaires/stratification complémentaire
Troupeau
d’origine
Prévalence de bactéries résistantes issues de populations animales (différents types de production)
Relation résistance – usage d’antibiotiques
Par classe d’âge, type de production, etc. Emploi d’antibiotiques au fil du temps
AbattoirFècesPrévalence de populations de bactéries résistantes issues d’animaux en âge d’abattage
IntestinIdem
CarcasseHygiène, contamination en cours d’abattage
Transformation, conditionnementProduits carnésHygiène, contamination en cours de transformation et de manutention
Commerce
de détail
Produits carnésPrévalence de bactéries résistantes d’origine alimentaire ; données d’exposition pour consommateurs
LégumesPrévalence de bactéries résistantes issues de produits maraîchers ; données d’exposition pour consommateurs
Origines diversesAliments pour animauxPrévalence de bactéries résistantes issues d’aliments pour animaux ; données d’exposition pour animaux
  1. Isolats bactériens

    Les catégories suivantes de bactéries seront éventuellement surveillées :

    1. Bactéries pathogènes des animaux

      Il est important de suivre l’antibiorésistance chez les agents pathogènes des animaux dans le but de :

      1. dépister des résistances émergentes pouvant constituer un risque pour la santé publique et la santé animale,

      2. aider les vétérinaires à prescrire les remèdes adéquats.

      Les informations relatives à l’apparition d’antibiorésistance chez les agents pathogènes des animaux proviennent généralement de matériels prélevés lors des examens cliniques de routine et envoyés aux laboratoires vétérinaires de diagnostic. Ces échantillons, qui proviennent souvent de cas cliniques graves ou récurrents, voire même d’échecs thérapeutiques, peuvent fournir des informations déformées.

    2. Bactéries zoonotiques

      1. salmonella

        Salmonella fera l’objet d’échantillonnages chez les bovins, porcins, poulets de chair et autres volailles. Les prélèvements seront effectués de préférence à l’abattoir afin de faciliter l’opération et limiter les frais concomitants. En outre, les programmes de suivi et de surveillance pourront également recourir à des isolats bactériens d’autres sources provenant de laboratoires nationaux désignés.

        Les bactéries et les souches bactériennes seront isolées et identifiées conformément aux procédures reconnues à l’échelle internationale.

        Les sérovars importants sur le plan épidémiologique, par exemple S. typhimurium et S. enteritidis seront inclus. Les autres sérovars d’intérêt seront choisis en fonction de la situation épidémiologique prévalant dans le pays.

        Tous les sérotypes et, s’il y a lieu, tous les lysotypes des isolats de Salmonella seront déterminés selon les méthodes standard en vigueur dans les laboratoires nationaux désignés.

        Des méthodes validées seront utilisées à cet effet.

      2. Campylobacter

        Campylobacter jejuni et C. coli peuvent être isolés à partir des mêmes échantillons que les bactéries commensales. Ces bactéries seront isolées et identifiées conformément aux procédures acceptées universellement. Les isolats de Campylobacter seront identifiés au niveau de l’espèce.

        Les méthodes par microdilution dans la gélose ou le bouillon de culture sont préconisées pour la détermination de la sensibilité de Campylobacter. Les programmes internes et externes de contrôle de la qualité seront rigoureusement respectés.

        Des méthodes validées à l’aide de souches de référence adéquates devraient être disponibles dans un avenir proche.

      3. Escherichia coli entérohémorragique

        Escherichia coli entérohémorragique, par exemple le sérotype O157, qui est pathogène pour l’homme mais pas pour les animaux, sera éventuellement inclus dans les programmes de suivi et de surveillance de l’antibiorésistance.

    3. Bactéries commensales

      Escherichia coli et enterococci sont des bactéries commensales communes. Elles constitueraient un réservoir de gènes d’antibiorésistance susceptibles d’être transmis à des bactéries pathogènes pour les animaux ou pour l’homme. Il est préconisé d’isoler ces bactéries à partir d’animaux sains, de préférence à l’abattoir, pour assurer le suivi de l’antibiorésistance.

      Des méthodes validées seront utilisées à cet effet.

  2. Stockage des souches bactériennes

    Dans la mesure du possible, les isolats seront préservés jusqu’à l’issue de la procédure de déclaration. Il est préférable de les stocker de façon permanente. Les collections de souches bactériennes, constituées à l’occasion du stockage de la totalité des isolats de certaines années, permettront la réalisation d’études rétrospectives.

  3. Utilisation des antimicrobiens dans la détermination de la sensibilité

    Les classes d’antimicrobiens importantes sur le plan clinique et utilisées en médecine humaine et en médecine vétérinaire feront l’objet d’un suivi. Toutefois, il conviendra sans doute de limiter le nombre des antimicrobiens concernés en fonction des ressources financières nationales.

  4. Nature des données à enregistrer et à conserver

    Les données concernant la sensibilité aux antimicrobiens feront l’objet d’une déclaration quantitative.

    Des méthodes validées adéquates seront employées conformément au chapitre 1.1.6. du Manuel terrestre relatif aux méthodes de laboratoire pour l’analyse de la sensibilité des bactéries aux antimicrobiens.

Tableau 3. Exemples de bactéries pathogènes des animaux à inclure éventuellement
dans la surveillance et le suivi de l’antibiorésistance

AnimauxAgents pathogènes des voies respiratoiresAgents pathogènes des intestinsAgents pathogènes du pisAutres agents pathogènes
BovinsPasteurella spp.Escherichia coliStaphylococcus 
aureus
Haemophilus 
somnus
Salmonella spp.Streptococcus spp.
PorcsActinobacillus 
pleuropneumoniae
Escherichia coliStreptococcus suis
Brachyspira spp.
Salmonella spp.
VolaillesEscherichia coli
PoissonsVibrio spp.
Aeromonas spp.
  1. Enregistrement, conservation et interprétation des résultats

    1. Une attention particulière sera accordée à la conception de la base de données, compte tenu du volume et de la complexité des informations et de la nécessité de les préserver indéfiniment.

    2. La conservation des données brutes (primaires et non interprétées) est essentielle pour l’évaluation de ces données à la lumière des divers problèmes, y compris ceux qui se manifesteront à l’avenir.

    3. Si l’on envisage l’échange de données entre les différents types d’ordinateurs, on tiendra compte de la configuration matérielle minimale des systèmes informatiques (comparabilité de l’enregistrement automatique des données de laboratoire et envoi de ces données aux programmes de suivi de l’antibiorésistance). Les résultats seront conservés dans une base de données nationale adaptée. Ils seront enregistrés sur une base quantitative :

      1. sous la forme d’une distribution des concentrations minimales inhibitrices en milligrammes par litre,

      2. ou de diamètre (en mm) des zones d’inhibition.

    4. Les enregistrements comprendront au moins les informations suivantes :

      1. le programme d’échantillonnage,

      2. la date de prélèvement,

      3. l’espèce animale ou le type de bétail,

      4. la nature de l’échantillon,

      5. la finalité de l’échantillonnage,

      6. l’origine géographique du troupeau ou de l’animal,

      7. l’âge de l’animal.

    5. La déclaration des données de laboratoire comprendra les informations suivantes :

      1. le nom du laboratoire,

      2. la date d’isolement,

      3. la date de déclaration,

      4. l’espèce bactérienne,

      et, s’il y a lieu, les autres caractéristiques de typage, par exemple :

      1. le sérovar,

      2. le lysotype,

      3. le résultat de la sensibilité aux antimicrobiens ou du phénotype de résistance.

    6. La proportion d’isolats considérés résistants sera notifiée, y compris les points de rupture définis.

    7. Les points de rupture sont employés dans le cadre clinique pour classer les souches bactériennes en souches sensibles, modérément sensibles ou résistantes. Ces points de rupture, souvent désignés points de rupture cliniques ou pharmacologiques, sont déterminés sur une base nationale et varient selon les pays.

    8. Le système de référence en vigueur doit être enregistré.

    9. Pour la surveillance, on privilégiera le point de rupture microbiologique, qui repose sur la distribution des concentrations minimales inhibitrices ou du diamètre des zones d’inhibition des espèces bactériennes spécifiques. Lors de l’utilisation des points de rupture microbiologiques, seule la population bactérienne devenue résistante et s’éloignant manifestement de la distribution de la population sensible normale sera désignée comme résistante.

    10. À défaut, on enregistrera le phénotype des isolats (profil de résistance).

  2. Laboratoires de référence et rapports annuels

    1. Les pays désigneront un centre national de référence qui aura pour responsabilité de :

      1. coordonner les activités des programmes de surveillance et de suivi de l’antibiorésistance ;

      2. centraliser les informations au niveau national ;

      3. préparer un rapport annuel sur la situation de l’antibiorésistance dans le pays.

    2. Le centre national de référence aura accès :

      1. aux données brutes,

      2. aux résultats complets des activités relatives à l’assurance de la qualité et à l’étalonnage inter-laboratoires,

      3. aux résultats des essais d’aptitude,

      4. aux informations sur la structure du système de suivi,

      5. aux informations sur les méthodes de laboratoire choisies.

2011 ©OIE - Code sanitaire pour les animaux terrestres

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